Alors que pfinge s'arrête sur le destinataire de la dédicace, je préfère oeuvrer sur le deuxième signataire de la dédicace, la dénommée et "mystérieuse" Leïlah.
Une personne qui aurait pu nous en parler est Erica, qui connut bien Jean-Michel Sorel. Le contact étant rompu, cela devient plus difficile... même si j'ai mon idée sur la question.
Dans le premier jet de biographie que j'ai rédigé sur Jean Michel Sorel (et non publié), j'ai noté :
« Comme romancier, il débute chez Roger Dermée à partir de 1953, dans les deux labels nouvellement créés par ce dernier et qui sont “Le Trotteur” – label orienté vers tout ce qui est roman noir / roman d’espionnage, et “Les Presses Mondiales”, label plutôt orienté vers les romans de guerre / documents du monde. Les raisons de son arrivée chez Dermée ne sont pas éclaircies, mais à cette époque, Dermée avait beaucoup de labels à alimenter, et il était prêt à prendre les manuscrits qui passaient à sa portée, pourvu qu’ils fussent dans ses lignes éditoriales.
Sorel lui propose un roman noir, intitulé “Y’en a marre… p’tite tête”, avec comme héros Larry Layne : «un bon petit reporter peinard», qui ne demande qu’«un assortiment de souris à la page et du pognon…»{1} . Le roman est signé du nom du héros : Larry Layne{2} , comme il est courant à l’époque de fusionner pseudonyme d’auteur et héros sous le même nom. La quatrième de couverture présente le roman comme «un vrai documentaire sur la Médina de Paris», et annonce que parmi les «mignonnes à la carrosserie en délire, il y a cette mystérieuse Leïlah {3}… La perle du Sud…». Notons l’appellation “Médina de Paris”, une allusion aux anciens quartiers musulmans des villes du Maghreb où fut envoyé en reportage Jean-Michel Sorel, et le prénom Leïlah, à confondre avec Leïla, une fille du Sud {4} qui aurait apporté au jeune auteur «la révélation de la Chair faite Amour»{5} , à qui il dédiera un futur roman “Charnellement vôtre…”, et pour qui il écrira une chanson{6} .
Le roman sera publié comme 11ème titre de la collection “Les Grands Romans Noirs” en septembre(?) 1953, mais sera frappé d’interdiction de vente aux mineurs et d’interdiction d’exposition et d’affichage en mars 1954 à la suite de la demande faite par le représentant de l’Union nationale des associations familiales. Il sera par ailleurs adapté (très librement) au cinéma en 1958 par le réalisateur belge Yvan Govar sous le titre “Y’en a marre” (titres alternatifs : “Ce soir on tue”, “Le gars d’Anvers”), sur un scénario écrit par Jean-Michel Sorel lui-même, avec Pierre Trabaud dans le rôle de Larry Layne {7}. »
Notes :
{1} in présentation du roman en quatrième de couverture.
{2} Deux autres romans seront signés du même pseudonyme, comme nous le verrons plus loin.
Faut-il voir un rapport entre le prénom “Larry” donné à son héros et le prénom “Larry” du héros et romancier Larry O’Brien dont Sorel est en train de traduire un roman au même moment… ? Possible… Dans “Remballe tes charmes”, Larry se présente lui-même de la manière suivante : « …Je me présente : Larry S. Layne, reporter… ». Notez le “S.”, que Sorel utilisera pour son autre pseudonyme Paul S. Nouvel…
{3} Orthographiée Leïlan dans le texte de la présentation.
{4} «A sa nostalgie, à sa sensualité ardente, il fallait les lourdes volutes bleutées des chevelures latines, la peau mate et ambrée des filles du Sud, les formes un peu lourdes des Orientales.» in La belle campeuse / Impasse à coeur - 1955 - page 181
{5} in Charnellement vôtre - 1955 - Dédicace de l’auteur, page 9
{6} “Leïla” : Paroles de Paul S. Nouvel ; Musique de Raoul Monis et Luc Gilmar. Editée aux Editions J. Monis, 26 rue du Château d’Eau – Paris 10ème. Le texte des paroles est donné pages 11 et 12 du titre “Charnellement vôtre…”
{7} Sortie en salles le 16 septembre 1959 – Disponible en VHS sur les sites Internet du marché de l’occasion.
TontonPierre